La Planète des singes (Planet of the Apes) est un film de science-fiction américain réalisé par Franklin Schaffner, sorti en 1968, avec Charlton Heston dans le rôle principal. Le scénario est de Rod Serling et Michael Wilson d'après le roman homonyme de Pierre Boulle. Il s'agit du premier film de la franchise La Planète des singes.
L'histoire suit le capitaine George Taylor, un astronaute qui amerrit sur une planète inconnue. Capturé par des singes évolués, il découvre que ceux-ci dominent la planète et ont réduit en esclavage les humains primitifs qui s'y trouvent. D'abord protégé par les chimpanzés progressistes Zira et Cornélius, Taylor doit ensuite s'enfuir avec eux pour échapper au docteur orang-outan Zaïus, l'hypocrite ministre des sciences. Cornélius les emmène sur le site archéologique où il travaille. Retrouvé par Zaïus, Taylor force ce dernier à admettre ce que Cornélius a mis au jour : une civilisation humaine avancée a existé avant celle des singes sur cette planète.
Le producteur Arthur P. Jacobs obtient les droits d'adaptation du roman dès 1963 mais ne parvient à convaincre le studio 20th Century Fox de lancer la production qu'en 1966. Le tournage se déroule de à , principalement au ranch de la Fox situé à Malibu à l'ouest de Los Angeles, à la plage de Zuma également située à Malibu et dans divers lieux d'Arizona, notamment au lac Powell et à Glen Canyon. La musique du film est composée et dirigée par Jerry Goldsmith.
Le film est une satire de l'intolérance et du fanatisme religieux. Il aborde de manière métaphorique le mouvement afro-américain des droits civiques, la domination relative de l'homme sur la nature et la peur des conséquences d'un conflit nucléaire.
La Planète des singes se révèle un succès commercial et critique et remporte quelques prix, notamment pour ses maquillages. En 2001, il est inscrit au Registre national des enregistrements de la Bibliothèque du Congrès. Son coup de théâtre final a profondément marqué les esprits. Il sort en vidéo dès les années 1970 en bobine super 8, puis au fil des années sur de nombreux autres supports. Il engendre plusieurs produits dérivés et de nombreuses suites.
En 1972Note 1, un vaisseau spatial américain part en mission d'exploration avec quatre membres d'équipage à son bord. Au terme d'un voyage d'une année correspondant, selon la théorie de la relativité, à deux mille années passées sur Terre, le vaisseau amerrit le sur une mystérieuse planète, au cœur d'une région désertique1,2. Réveillés par le choc, les astronautes découvrent que leur collègue féminine, Carole Stewart, est morte lors du périple des suites d'une fuite d'air dans son caisson de survie3.
Lac où amerrit le vaisseau spatial américain
Note 2.
Les trois survivants, le capitaine George Taylor et les lieutenants John Landon et Thomas Dodge, gagnent la terre ferme grâce à un canot de sauvetage. Taylor explique à ses hommes qu'ils doivent être sur une planète de l'étoile Bellatrix dans la constellation d'Orion. Ils marchent ainsi dans une région désertique puis découvrent des plantes et enfin un signe de vie intelligente : des épouvantails. Un peu plus loin, ils tombent sur une vallée luxuriante où ils trouvent un point d'eau et s'y baignent. C'est alors que des hommes primitifs arrivent et détruisent leurs instruments et leurs vêtements. Suivant les primitifs, Taylor et ses hommes découvrent un champ de maïs où ils se restaurent. C'est alors qu'ils sont attaqués par des gorilles évolués, montés sur des chevaux et armés de fusils. Une chasse à l'homme s'ensuit. Les gorilles tuant ou capturant sans discernement ; Dodge est abattu tandis que Landon est pris dans des filets. Taylor tente de s'enfuir, mais recevant une blessure à la gorge, qui le rend temporairement muet, il s'écroule et est capturé3.
Les blessés humains sont envoyés auprès du chirurgien Galen et du docteur Zira à l'infirmerie du laboratoire scientifique de la Cité des singes. Soigné et mis en cage, Taylor attire l'attention de la femme chimpanzé Zira par son comportement plus civilisé que ses congénères. Le supérieur de celle-ci, le ministre de la foi et des sciences, l'orang-outan Zaïus est également intrigué par Taylor. Cependant, il pense, contrairement à elle, qu'il est une menace pour les singes. Zira, qui baptise Taylor « Beaux Yeux », met une femme dans sa cage pour lui tenir compagnie. Zira veut prouver que les singes peuvent domestiquer des hommes et que ces derniers ne doivent plus être considérés comme des bêtes sauvages. Elle finit même par amener Taylor chez elle pour le présenter à son fiancé, l'archéologue chimpanzé Cornélius. L'homme leur écrit alors son histoire. Il leur dit venir d'une autre planète et avoir amerri dans l'endroit que les singes appellent la « Zone interdite ». Cornélius, sceptique, pense cependant que Taylor est le « chaînon manquant » de l'histoire de l'évolution simiesque3.
Zaïus toujours méfiant ordonne la castration de Taylor. L'apprenant, celui-ci assomme Julius, le gardien du laboratoire, et s'enfuit. En traversant la ville, il découvre Dodge empaillé dans un musée. Semant la panique dans la ville, il est repris mais retrouve sa voix. Julius, pour se venger, le sépare de la femme qui partage sa cage et que Taylor a baptisée Nova3.
Taylor passe ensuite devant une commission où siègent, en plus du président de l'académie des sciences, les orangs-outans Maximus, commissaire aux affaires animales, et Zaïus, qui est ministre de la science. L'accusation est menée par le docteur Honorius, l'adjoint au ministre de la justice. Zira et Cornélius sont également présents car Zaïus les soupçonne d'avoir modifié Taylor pour lui donner la parole. Taylor raconte à nouveau son histoire mais n'est pas cru. Le tribunal lui permet alors de retrouver Landon, mais Taylor s'aperçoit que ce dernier a subi une trépanation qui l'a rendu stupide. La séance est ensuite levée et Zaïus fait venir Taylor dans son bureau. L'orang-outan lui avoue qu'il le considère comme un mutant et souhaite savoir où se cachent ses semblables. Taylor n'ayant rien à lui révéler, Zaïus le fait ramener en cage3.
Bande-annonce américaine du film.
Le soir venu, Lucius, le neveu de Zira, pénètre dans le laboratoire et aide Taylor à assommer Julius. Quittant le laboratoire avec Lucius et Nova, Taylor fuit ensuite la ville avec eux et Zira. Ils sont alors rejoints par Cornélius qui souhaite les emmener sur les lieux d'une ancienne fouille archéologique dans la « Zone interdite ». En se rendant là-bas, il pourrait prouver sa théorie du chaînon manquant et ainsi se blanchir auprès de la commission. En chemin, il apprend à Taylor que cette région aride est interdite aux singes depuis 1 200 ans par le législateur qui a rédigé les lois des singes3.
Arrivés sur la plage qui borde les lieux, ils sont rattrapés par Zaïus et une troupe de gorilles. Armé d'un fusil, Taylor menace Zaïus et le force à entrer dans la grotte qui renferme les objets antiques. Cornélius leur montre ses découvertes, dont une poupée humaine qui serait vieille de 2 000 ans. Zaïus leur révèle alors qu'il sait depuis longtemps qu'une civilisation humaine a existé avant celle des singes et que c'est elle qui est responsable de l'aridité de la Zone interdite3.
Taylor décide alors de partir loin des singes avec Nova. Il se fait remettre un cheval et des munitions contre la liberté de Zaïus. Après son départ, le ministre ordonne que la grotte soit détruite pour faire disparaître les découvertes de Cornélius et Zira. Suivant la plage, Taylor découvre horrifié les vestiges à moitié ensevelis de la statue de la Liberté, ce qui lui fait prendre conscience que la planète où il a échoué n'est autre que la Terre. Plein de désespoir, Taylor tombe à genoux tout en fustigeant l'humanité pour avoir détruit son propre monde3.
Liste des principaux personnages :
- George Taylor est le héros du film. C'est un misanthrope qui s'embarque dans une mission spatiale à seule fin d'échapper à ses semblables, certain qu'il est de trouver meilleur que l'homme au cours de son voyage4. Son personnage est basé sur celui d'Ulysse Mérou, le héros du roman La Planète des singes5. Dans les scripts de Rod Serling, il s'appelle Thomas. Quand Michael Wilson reprend le scénario, il le rebaptise George Taylor4. Selon son interprète Charlton Heston, Taylor a un souverain dédain de ses semblables. À ses yeux, « l'homme est un animal qui laisse beaucoup à désirer ». Et dans la société anthropoïde qu'il découvre, il se voit « contraint de prendre la défense de l'Homo sapiens qu'il méprise »6. Heston y voit une dichotomie intéressante7. Lors du récit, Taylor passe du statut de héros à une position dominée. Cela est déstabilisant pour l'audience de 1968, car Charlton Heston est associé à l'époque plutôt à des personnages forts et imposants7.
- Zira et Cornélius sont un couple de chimpanzés scientifiques qui aident Taylor et qui découvrent avec lui l'existence d'une civilisation humanoïde antérieure à celle des singes4. Incarnés par Kim Hunter et Roddy McDowall, ils représentent la bienveillance de la société simiesque6.
- le docteur Zaïus est l'hypocrite ministre des sciences et le défenseur en chef de la foi simiesque. Il voit en Taylor une menace qu'il faut éliminer4. Incarné par Maurice Evans, il figure avec les gorilles le régime de terreur et d'oppression de la société des singes6. Même si son travail est voué à l'échec, ses conceptions du côté malin de la nature humaine sont confirmées par le dernier plan du film8.
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Sources : RS Doublage11 et Voxofilm10.
- Photos des acteurs principaux.
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En 1963, le publicitaire américain Arthur P. Jacobs décide de se lancer dans la production cinématographique en fondant la société APJACNote 3,5. Alors que Jacobs se trouve à Paris pour rechercher des scénarios à produire, l'agent littéraire Alain Bernheim, lui propose plusieurs romans à adapter12. L'un d'eux intrigue Jacobs : il s'agit de La Planète des singes de Pierre Boulle. Il en achète donc immédiatement les droits d'adaptation pour le cinéma7,12,13. En 1964, Jacobs parvient à associer le réalisateur Blake Edwards au projet ainsi que le studio Warner Bros.14,15,16. Il embauche ensuite sept artistes pour créer des dessins préparatoires et le scénariste Rod Serling, créateur de la série télévisée La Quatrième Dimension (1959-1964)17,7,16. Il obtient ainsi un livre de plus de 130 pages d'idées et de concepts pour donner vie au projet7.
Serling entame alors l'écriture de plus d'une dizaine d'ébauches14,15. Il rebaptise le héros du roman Ulysse en Thomas14. Il mélange ensuite le roman de Pierre Boulle et le scénario d'un épisode de La Quatrième Dimension diffusé en 1960 : La Flèche dans le ciel18. Ce dernier raconte l'histoire d'une équipe d'astronautes qui s'écrasent au milieu d'une planète inconnue et qui finissent par se retourner les uns contre les autres. Après avoir tué ses deux derniers compagnons, l'ultime survivant découvre qu'ils étaient sur Terre depuis le début18.
Du livre de Boulle, Serling retient l'idée d'une civilisation anthropoïde moderne propulsant le héros du statut de prisonnier des singes à celui de célébrité14. Il garde aussi le fait que le héros découvre ses amis astronautes dans un zoo et qu'il comprenne que le docteur Zaïus veut l'éliminer pour faire disparaître toute trace d'une civilisation humaine antérieure19. Serling introduit par contre le thème de la guerre froide, notamment à la fin, où il révèle que la planète des singes est en fait la Terre du futur que l'homme a ravagée lors d'une guerre nucléaire20. Les ébauches de Serling restent cependant assez éloignées de la version finale du scénario19. Dans son premier script, il n'y a pas d'amerrissage en catastrophe du vaisseau spatial car Thomas et ses collègues utilisent un véhicule amphibie à chenilles pour explorer la planète19. Dans son deuxième script, il ajoute qu'un des membres de l'équipage succombe dans la chambre de cryogénisation, et les épouvantails qui marquent la lisière de la Zone interdite. Serling réintègre les éléments relatifs à la fouille archéologique présents dans le livre de Boulle, notamment la découverte de la poupée humaine. Il y rajoute cependant un débat autour de la radioactivité du site. C'est dans ce deuxième script qu'il ajoute également le final de la statue de la Liberté19,16. Cornélius est alors très peu présent et sa relation avec Zira n'est pas évoquée19. Dans le troisième script, Serling transfère certains des dialogues de Zaïus à Cornélius qui est cette fois présenté comme étant l'époux de Zira19. Au cours de cette intrigue Zira emmène Thomas à dîner en ville et l'enivre19. Il reprend aussi un autre élément du roman lorsque Thomas demande à embrasser Zira pour lui dire au revoir. Elle lui réplique « Mais vous êtes tellement laid ! »21.
Warner Bros réalise donc des projections budgétaires qui indiquent que le projet est trop onéreux22. Jacobs accepte ainsi de revoir le budget à la baisse. Frustré par ce revirement, le réalisateur Blake Edwards quitte le projet. Et comme Warner Bros n'est lié qu'à Edwards, Jacobs se retrouve alors également sans studio22,16. Il se tourne vers d'autres studios mais sans succès7. À la Metro-Goldwyn-Mayer, faute de convaincre les décideurs, il noue un partenariat avec Mort Abrahams, le producteur de la série Des agents très spéciaux (1964-1968)16.
En juin 1965, Arthur P. Jacobs se met en quête d'un acteur de premier plan pour faire parler du projet. Il contacte ainsi Marlon Brando, Burt Lancaster, Paul Newman, Rock Hudson, Jack Lemmon et Charlton Heston. Seul ce dernier est intéressé7,13,18,22. Il trouve le concept fascinant. Il propose même à Jacobs un réalisateur : Franklin Schaffner7,23,24. Celui-ci a énormément travaillé pour la télévision et a même réalisé des documentaires sur la Maison-Blanche en collaboration avec Jackie Kennedy23. Il a également déjà dirigé Heston dans le film d’aventures Le Seigneur de la guerre en 196525,7,24. Schaffner accepte de participer au projet même s'il est convaincu qu'il ne se fera jamais26,27. Jacobs obtient également l'accord de l'acteur Edward G. Robinson pour jouer le docteur Zaïus23.
Épuisé par la rédaction de plus de trente scripts, Rod Serling quitte le projet fin 196526,7. Il est remplacé par Charles Eastman. Mais celui-ci est remercié après l'écriture de son premier script d'une trentaine de pages faisant la part belle à des dialogues d'astronautes utilisant un jargon inintelligible de science-fiction26. Jacobs et Schaffner se tournent alors vers le scénariste Michael Wilson. Ce dernier renomme le personnage principal George Taylor et en fait un misanthrope4. Il rédige une nouvelle version de scénario qui transforme l'arrivée des astronautes en un amerrissage forcé et la société futuriste des singes en un état préindustriel où les singes montent à cheval et tirent à la carabine4,7. La version de Wilson met ainsi en scène plus d'action tout en réduisant les coûts de production. Il n'y a donc plus que trois grands ensembles de scènes : le début avec l'encerclement des astronautes par le bataillon de singes, le milieu dans la cité et la fin sur le site de fouille archéologique28.
Début 1966, Arthur P. Jacobs propose le projet à Richard D. Zanuck, directeur de production de la 20th Century Fox avec qui il produit le film musical L'Extravagant Docteur Dolittle (1967)28,7,24. Bien que lui-même captivé par le concept, Zanuck n'est alors pas convaincu que le public prendra au sérieux des personnages anthropoïdes doués de parole29,7,24. Le producteur accepte cependant de financer un test pour aborder le concept29,7,27. Ainsi en mars 1966, pour cinq mille dollars, Schaffner réalise une scène de cinq minutes avec Charlton Heston, Edward G. Robinson en Zaïus, James Brolin en Cornélius et le mannequin Linda Harrison, la nouvelle compagne de Zanuck, en Zira. Les maquillages des singes sont alors réalisés par Ben Nye, le chef du département maquillage de la Fox30,31,15,7,27. Le test est convaincant, mais Zanuck reste encore sceptique29. À l'été 1966, le film de science-fiction Le Voyage fantastique produit par la Fox remporte un franc succès commercial et critique. Jacobs pousse alors Zanuck à donner son feu vert à La Planète des singes en lui faisant miroiter qu'il aura un succès comparable30,15,32. Zanuck finit par céder et lance la production du film30,31,7,32.
Pour donner corps à l'œuvre, les producteurs engagent comme superviseur artistique William Creber déjà responsable pour la Fox des séries télévisées Perdus dans l'espace (1965-1968), Voyage au fond des mers (1964-1968) et Au cœur du temps (1966-1967)30,32. Creber travaille alors à définir un style inédit pour les extérieurs, les décors, les accessoires mais aussi les costumes et les grimages33. Creber réalise notamment l'apparence de l'astronef et en fait réaliser une maquette. Cependant pour que le modèle réduit ne soit pas détruit lors de l'amerrissage et pour que le problème d'échelle ne saute pas aux yeux, il demande à Schaffner que le plan où l'appareil part en vrille soit filmé d'un point de vue subjectif jusqu'à l'impact. Ensuite la caméra recule et la scène revient à l'intérieur de l'engin7,33. Creber construit également l'avant du vaisseau en taille réelle pour les plans où les astronautes quittent l'appareil7.
Les producteurs décident de construire la Cité des Singes au ranch de la Fox situé à Malibu à l'ouest de Los AngelesNote 4,32,33. Creber travaille avec Mentor Heubner à la conception des demeures des singes. Il mélange ainsi les habitats troglodytiques de la vallée de Göreme en Cappadoce avec les œuvres d'Antoni Gaudí pour leur donner un cachet architectural7,32,34. Quand Creber montre les résultats à Arthur P. Jacobs, celui-ci est conquis. Il lui avoue alors que « cela ne ressemble à rien que j'aie pu voir jusqu'à présent »34,7. Creber demande ensuite au maquettiste Constantine Moros de construire une maquette au 1/50e34. Creber découpe alors la maquette pour en obtenir des moules qu'il scie ensuite en tranches pour que la fabrique de la Fox puisse bien voir comment construire le décor. Les éléments sont ensuite construits en injectant de la mousse en uréthane dans des grands moules en carton. Ils sont ensuite envoyés bloc par bloc sur le lieu de tournage à Malibu7,34. L'étang où se baignent les astronautes a été créé de toutes pièces dans le ranch pour les besoins du précédent film de Jacobs, L'Extravagant Docteur Dolittle7,35. La cascade attenante est réalisée à l'aide d'une vingtaine de tuyaux d'incendie cachés7,35.
Le chef du département artistique de la Fox, Jack Martin Smith fait découvrir à Schaffner l'endroit idéal pour les scènes de la Zone interdite, les abords du lac Powell dans l'Utah33, qui ont servi deux ans plus tôt de décor au péplum biblique La Plus Grande Histoire jamais contée36. Lors de sa première visite sur les lieux, le caméraman de Schaffner, Leon Shamroy lui déclare : « c'est un paysage véritablement épique »33.
Séance de maquillage et pose des prothèses sur le visage de
Kim Hunter, en août 1967.
En janvier 1967, la création des costumes du film est confiée à Morton Haack et la création des maquillages à John Chambers7,37. Ce dernier avait notamment créé les maquillages de la série Perdus dans l'espace38 mais aussi de Les Monstres (1964-1966) et d’Au-delà du réel (1963-1965)7,36. Pour La Planète des singes, il doit concevoir trois espèces distinctes de grands singes : les gorilles, les chimpanzés et les orangs-outans38. De plus, il doit personnaliser les visages de Zaïus, de Cornélius, de Zira et des autres simiens de premier plan. Il doit également fournir des maquillages pour l'ensemble des habitants de la cité des singes38. Chambers développe alors plusieurs prothèses en latex pour permettre au visage des acteurs de former des expressions. Il y en a une pour le menton, une pour la partie supérieure de la bouche et le nez et une pour l'arcade sourcilière38. Cependant les premiers résultats ne convainquent pas Jacobs38. Chambers et ses maquilleurs ont en effet travaillé à partir de photos et sont allés voir des singes au zoo mais ne se sont jamais approchés d'un singe. Creber parvient à leur trouver un singe, en la personne de Debbie, la chimpanzé femelle de la série Perdus dans l'espace7,36,39. Les maquilleurs examinent alors la texture et la couleur de sa peau et prennent des photos de ses mains. La semaine suivante, les maquilleurs réalisent un nouveau concept qui fonctionne39. Durant le tournage, l'équipe de Chambers compte 60 maquilleurs et 40 perruquiers qui produisent tous les jours grimages et prothèses pour 35 à 38 personnages de premier plan et 160 personnages de second plan40. Les maquillages coûtent à eux seuls un des 5,8 millions de dollars du budget7,36.
- Costumes du film
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Costume de chimpanzé femelle.
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Costume de gorille mâle avec cartouchière.
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Costume d’orang-outan mâle.
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Tunique primitive du colonel George Taylor.
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Uniforme de l'astronaute Stewart.
Cardiaque, l'acteur Edward G. Robinson se retire alors du projet : il pense en effet ne pas pouvoir supporter les nombreuses heures de maquillage7,27,31,41. Schaffner confie donc le rôle de Zaïus à l'anglais Maurice Evans7,31,41. Un autre acteur britannique, Roddy McDowall, est retenu pour incarner Cornélius7,41,42. Jacobs propose le rôle de Zira d'abord à Shirley MacLaine puis à Julie Harris qui le refusent, et finalement à Kim Hunter qui l'accepte7,41,42. Face aux responsables de la Fox qui ne comprennent pas pourquoi il engage des acteurs confirmés pour interpréter les singes (selon Creber, de simples cascadeurs suffiraient), Schaffner leur affirme « qu'il faut des acteurs véritablement doués qui puissent projeter des émotions »7,38,42. Le rôle muet de Nova est confié à Linda Harrison, la compagne du producteur Richard D. Zanuck7.
Le tournage débute le 7,43 : les scènes d'exploration de la région du lac Powell en Arizona par les astronautes sont les premières tournées, en décor naturel7,33 ; le superviseur artistique William Creber indique d'ailleurs que « vous pouviez parcourir des kilomètres et il n'y avait rien qui poussait. C'était donc le cadre parfait »33. Ces scènes sont particulièrement difficiles pour les comédiens et les techniciens à cause des températures frôlant les 38 degrés Celsius33. Jeff Burton qui interprète l'astronaute Dodge s'évanouit même à cause de la chaleur2,7. Les autres scènes en terrain désertique sont également tournées en Arizona près de Glen Canyon, du fleuve Colorado et de la ville de Page7,43. Après plusieurs jours de tournage, le producteur Mort Abrahams demande au réalisateur pourquoi ils sont toujours dans le désert à tourner des scènes d'introduction, Schaffner lui répond qu'il veut faire ressentir aux spectateurs sur la durée, l'épreuve endurée par les astronautes pour donner le ton du film2.
La partie de chasse aux humains, organisée par les gorilles, est minutieusement préparée par le réalisateur Franklin Schaffner qui souhaite faire de cette scène un des grands chocs cinématographiques de l'époque44. Il fait par exemple pousser un champ de maïs en un temps record au beau milieu du ranch de la Fox pour rendre la battue plus mystérieuse7,45. Pour rendre l'apparition des gorilles plus effrayante, Creber teinte le pelage des gorilles et de leurs montures dans une même palette de mauve et de noir, donnant ainsi l'impression que les gorilles ne font plus qu'un avec leur montures, comme des sortes de centaures. De plus, pour rendre plus effrayant les chênes du ranch de la Fox, Creber demande à ce que tout soit tourné à contre-jour, « afin qu'on ne voie pas les arbres verts mais presque noirs »44.
Le , alors que doit être tournée la scène où Taylor doit retrouver la parole après avoir été rendu muet, Charlton Heston se réveille avec une angine. Malgré cela, il parvient à tourner la scène. Il indique d'ailleurs : « Comme il s'agit de la première scène où nous entendons Taylor après sa blessure à la gorge, le cri rauque que j'ai pu produire était idéal ». D'une manière générale, le tournage n'est pas reposant pour l'acteur. Le même jour il reçoit des coups de tuyau d'arrosage le laissant dégoulinant d'eau. Le lors de la scène du procès, il est malmené par un gorille qui le ligature et le tient attaché. Le 29 juin, il passe la journée à courir pieds nus au sein de la Cité des singes. Le , il reçoit des torrents d'eau dans la capsule spatiale censée sombrer46. Le même jour, il note dans son journal : « "Je réalise qu'il n'y a guère de scène dans ce satané film, où je n'ai pas été traîné, étranglé, ramassé dans un filet, pourchassé, arrosé, fouetté, saigné, pris pour cible, bâillonné, lapidé, chevauché, et de manière générale maltraité" »47.
La scène finale, où Taylor s'écroule devant les ruines à demi ensevelies de la statue de la Liberté est tournée à la plage de Zuma à Malibu entre le 3 et le 10 août7,43,47. Seules la tête et la torche de la statue sont construites sur les lieux. La vision d'ensemble est une peinture sur cache réalisée par Emil Kosa, directeur adjoint du département des peintures de la Fox7,47,48.
Le tournage prend fin le à cause de restrictions budgétaires qui contraignent le réalisateur à n'avoir que 45 jours de tournage au lieu des 55 prévus2,7,49.
Le montage est confié à Hugh S. Fowler et avance rapidement37. Un passage du film est cependant problématique et peut contrevenir au code de production du cinéma américain49. Il s'agit de la phrase que Taylor prononce à la fin du film : God damn you. Le producteur Arthur P. Jacobs convainc les censeurs d'autoriser cette phrase car elle ne vise pas à maudire Dieu mais demande plutôt à celui-ci de damner ceux qui ont détruit la civilisation49,50,Note 5. Le montage est terminé dès l'automne 196750.
Le producteur Richard Zanuck, même s'il soutient le film, a un doute sur la réaction du public. Il craint que les spectateurs se mettent à rire en entendant des singes parler. Il organise alors une projection test dans la ville de Phoenix. Cette séance le rassure car le public adhère complètement au postulat. Il déclare d'ailleurs que « c'est à cet instant seulement que nous avons compris. Nous avions touché quelque chose, profondément enfoui en chacun de nous. Les gens étaient captivés »51.
La musique du film est confiée à Jerry Goldsmith qui est alors en contrat avec la Fox depuis le début des années 1960. Celui-ci a déjà collaboré avec le réalisateur Franklin Schaffner sur son premier film Les Loups et l'Agneau en 1963. Goldsmith a pour mission de renforcer l'impression d'une planète extraterrestre ainsi que de créer un nouveau son pour évoquer une culture anthropoïde inédite. Il ne doit pas utiliser d'orgue de Barbarie ou de fanfares de cirques qui sont beaucoup associés aux singes dans les films américains. Godsmith refuse également d'utiliser de la musique électronique comme l'ont fait par exemple Bebe et Louis Barron pour l'opéra de l'espace Planète interdite en 195635,52.
Pour l'ouverture musicale qui accompagne le générique, Goldsmith utilise des notes graves de piano qui « pilonnent » la séquence pour donner l'impression d'un monde étranger. La tonalité devient encore plus menaçante du fait de la sonorité des cordes stoppées net d'un revers de main. Le premier indice simiesque qu'il livre ensuite est le grincement d'une flûte à coulisse53. Pour donner de la couleur à la partition, Godsmith ajoute plusieurs percussions originales notamment des culs de poule. Il obtient ainsi des cliquetis toniques pour donner une impression déconcertante de folie chaotique durant la scène où les astronautes dévalent une pente7,45,53. Le compositeur demande également à ses percussionnistes de gratter des gongs avec des triangles et aux joueurs de cor de souffler à l'envers dans le bec de l'instrument pour générer un souffle caractéristique pour les scènes de la Zone interdite. Il ajoute aussi des angklungs, des instruments indonésiens en bambou qui créent un son évocateur de frottement crépitant pour ponctuer un certain nombre de scènes dont la fuite de Taylor dans la Cité des singes et la séquence des fouilles archéologiques53.
Pour donner malgré tout un effet électronique à sa partition, Goldsmith se sert d'un echoplex, une machine qui permet de diffuser un son en différé pour réaliser un écho à dissipation graduée. Le compositeur enregistre séparément les altistes et les violoncellistes puis passe le tout à l'echoplex pour créer des sonorités spatiales pour accompagner les séquences du désert54. Pour la séquence où les hommes sont encerclés par les gorilles à cheval, Goldsmith crée un morceau nommé La Chasse. Il utilise une corne de bélier, un classique pour faire retentir les cris de guerre7,45,54. Il complète le son par un instrument brésilien, un cuíca, un tambour à friction à la membrane percée au centre pour y faire passer une tige et qui produit une sorte de grognement. Ce son est notamment mis en avant lors de la fin de la chasse7,45,55. Pour le moment où Taylor retrouve Landon lobotomisé, les trombones donnent voix à la frustration de Taylor55.
C'est le label 3 Records, la marque fondée par le musicien Enoch Light, qui édite les partitions de Goldsmith de La Planète des singes. Light enregistre les thèmes musicaux du film avec son propre orchestre. La Planète des singes est l'une des premières bandes-son à sortir en cassette audio en plus du disque microsillon. Le morceau La Chasse est cependant manquant et ce n'est qu'en 1992 lors de la ressortie de la musique chez Intrada Records qu'elle est incluse. La partition intégrale est, elle, commercialisée en 1996 chez Varèse Sarabande56.
- Liste des morceaux du disque de 196857
- Liste des morceaux de l'intégrale de 199658
Le film est salué par une critique dithyrambique quasi-unanime51,59. Elle voit en ce film de la science fiction sérieuse et adulte à l'instar du film sorti le même jour 2001, l'Odyssée de l'espace et loin des feuilletons du type de Flash Gordon (1954-1955)60.
Dans la revue Life, Richard Schickel écrit que « La Planète des singes est le meilleur film américain que j'aie vu jusque-là cette année. C'est une œuvre consciente de (et enthousiasmée par) ses propres possibilités »59,61. Même la critique acerbe Pauline Kael de The New Yorker adore le film, elle écrit que « c'est l'un des meilleurs opus de science-fiction à n'avoir jamais été produits par Hollywood »59. Kael d'habitude très critique avec Charlton Heston, loue la prestation de l'acteur : « C'est l'archétype de ce qui fait que les Américains gagnent... Il représente la puissance américaine. Il incarne le mythe de la star de cinéma à un point que c'en devient absurde. C'est le parfait Adam américain »6. Le scénariste Michael Wilson dit d'ailleurs que le personnage de Taylor est un second Adam qui devient « l'unique espoir de survie d'une espèce » qu'il méprise. Il a même proposé au producteur Arthur P. Jacobs de rebaptiser le film Notre second Adam ou Adam II62.
John Mahoney du magazine The Hollywood Reporter indique que « par son appel à la fois à l'imagination et à l'intellect dans un contexte d'action et d'aventure élémentaire, par sa pertinence relative aux problématiques de son époque, par les moyens avec lesquels il offre un divertissement total... La Planète des singes est un film rare qui transcendera les âges et les groupes sociaux ». Kevin Thomas du journal Los Angeles Times trouve que le film est une « rareté, un blockbuster hollywoodien qui non seulement tente beaucoup mais accomplit tout ce qu'il a l'intention de faire. Un triomphe d'art et d'imagination ». Art D. Murphy du magazine Variety écrit que le film est une « allégorie politico-sociologique, moulée dans le moule de la science-fiction futuriste, la production est un mélange intrigant de satire effrayante, une juxtaposition parfois étrange de mœurs humaines et singes, d'optimisme et de pessimisme. »61.
Les quelques critiques négatives viennent du quotidien The New York Times qui indique que même si le film reste amusant à regarder, « il n'est pas bon du tout », de l'hebdomadaire The Nation61 qui trouve « l'histoire inintéressante et les dialogues abrutissants »61 et du quotidien The Times qui pense que « l'histoire est passée de la satire swifienne à l'auto-parodie »61.
Sur le site Rotten Tomatoes, le film obtient le score de 88 % pour un total de cinquante-huit critiques63. En 2008, La Planète des singes est sélectionné par le magazine Empire pour figurer sur sa liste des 500 plus grands films de tous les temps64.
La Planète des singes est un succès commercial avec 32 589 000 dollars de recettes en Amérique du Nord pour un budget de 5 800 000 dollars15,65. Il est l'un des plus gros succès de l'année66. En France avec 1 715 000 entrées, le film se classe en vingt-huitième position du box-office de l’année 1968 loin derrière 2001, l'Odyssée de l'espace (7e) mais devant Barbarella (54e), les deux autres films de science-fiction de l'année67.
Résultats au box-office par région/pays
Pays | Box-office (1968) | Classement de l'année (1968) |
France |
1 715 000 entrées |
28e |
États-Unis |
32 589 000 US$ |
6e |
Le film obtient un oscar d'honneur pour le maquillage de John Chambers. Il est également nommé pour les costumes de Morton Haack et la musique de Jerry Goldsmith68,66,7. Par la suite il est inscrit au registre national des films des États-Unis68.
Note : sauf mention contraire, les informations ci-dessous sont issues de la page Awards du film sur l'Internet Movie Database68. Ici sont listés les principaux prix.
Le film obtient les nominations suivantes :
Année | Cérémonie ou récompense | Prix | Lauréat(es) |
1968 |
Laurel Awards |
Meilleur film dramatique |
|
1969 |
Oscars du cinéma |
Meilleurs costumes |
Morton Haack |
Meilleure musique originale |
Jerry Goldsmith |
Le scénariste Michael Wilson qui a notamment figuré sur la liste noire de Hollywood au temps du maccarthysme politise beaucoup le scénario7,28,32. Il se soucie des injustices sociales et concentre donc son histoire sur la répression des connaissances, l'intolérance et le fanatisme religieux. Son scénario est une satire62, une métaphore sur la situation de l'époque51, à la manière de Jonathan Swift ou de George Orwell32. Il détourne des références culturelles pour les adapter à la société simiesque28. Le directeur de production Richard D. Zanuck avoue ne pas avoir vu le sens politique du film. Il pensait produire seulement un film d'aventures7,47.
Durant la scène du tribunal, alors que Taylor explique d'où il vient, les trois juges adoptent la posture des singes de la sagesse. Maximus se couvre les yeux, le président se bouche les oreilles et Zaïus masque sa bouche69. Cette allusion n'est pas prévue par le scénario. C'est le réalisateur Franklin Schaffner et l'acteur Charlton Heston qui en ont l'idée durant le tournage, d'abord pour s'amuser, puis ils la proposent aux producteurs qui acceptent de l'inclure7.
Comme souvent dans la science-fiction, les non-humains sont un miroir reflétant les travers de l'humanité7,70. Dans la planète des singes, la société est théocratique. Elle suit aveuglément les règles édictées par les « Écritures »Note 25,70. Elle est divisée en trois castes infrangibles : les orangs-outans, les gorilles et les chimpanzés70. Les premiers sont les dirigeants. Ils occupent les places principales dans les sciences et la religion. Les deuxièmes sont des brutes qui s'occupent des affaires militaires et policières. Les troisièmes sont des sympathiques pacifistes prenant des risques pour défendre une noble cause70. Chose étrange, lors des pauses déjeuner durant le tournage, les acteurs représentant chacune des castes se regroupent naturellement pour déjeuner avec leurs semblables7,46. Il s'agit, en fait, d'une représentation schématique et sommaire des États-Unis des années soixante bousculés par la révolution sexuelle, la Guerre du Viêt Nam, les émeutes raciales de Watts ou de Détroit et le mouvement afro-américain des droits civiques51,70. Linda Harrison, l'interprète de Nova indique que les américains avaient alors « vraiment la trouille de faire sauter la planète. A cette époque, en classe, on nous apprenait à nous cacher sous nos bureaux en cas d'attaque nucléaire. Le film touchait une corde sensible. Et puis, il y avait les droits civiques : le film montrait cette division, les barrières que nous avions dressées »51. Le film est très tôt vu comme une évocation du racisme, ainsi dès sa sortie l'artiste Sammy Davis, Jr. l'affirme publiquement en indiquant que c'est « le meilleur film sur les relations entre blanc et noir que j'ai jamais vu »71,72.
L'intransigeance scientifique des orangs-outans rappelle également l'intolérance de l'Église catholique du début du xvie siècle à l'égard des Indiens d'Amérique. Le procès de Taylor prenant alors des airs de controverse de Valladolid70, la caste des orangs-outans faisant en quelque sorte office de clergé60. Le docteur Zaïus affirme d'ailleurs que si Taylor « était le chaînon manquant, les Livres Sacrés seraient faux ». Cette phrase est une référence aux mouvements religieux qui réfutent le darwinisme en faveur du créationnisme70. Le procès de Taylor peut également être vu comme une référence au Procès du singe qui oppose en 1925 des fondamentalistes chrétiens à un professeur d'école qui a enseigné la théorie de l'évolution à ses élèves69. Le procès a d'ailleurs donné lieu à un film en 1960 : Procès de singe73.
Le film est également une réflexion sur la domination relative de l'homme sur la nature70,3. Il montre en effet des êtres humains traqués pour le plaisir pour « une bonne chasse », servir de cobaye « pour le bien de la science » où même être considérés comme nuisibles en mettant les récoltes en danger70. Le premier article de la foi simiesque indique aussi que « Le Tout-Puissant créa le singe à son image, lui donna une âme et un esprit qui le différencient des bêtes et fit de lui le seigneur de la planète »70. Il place ainsi l'homme, remplacé à la tête de la création, comme un gibier nuisible qui met en danger l'espèce dominante et qui doit donc être éradiqué70.
Réalisé en pleine guerre froide, le film met en avant la peur des conséquences d'un conflit nucléaire25,70. Il présente dans son final les conséquences peu réjouissantes pour l'homme de la guerre nucléaire. Le producteur Arthur P. Jacobs et le réalisateur Franklin Schaffner voulaient d'ailleurs accentuer le final par la mort de Taylor abattu par des gorilles. Les derniers mots du personnage auraient été : « Je suis le dernier de la race des maîtres. Celle des tueurs ». Zaïus aurait alors rajouté « Prions pour que l'espèce soit éteinte »74. La scène est tournée par Schaffner mais Wilson s'oppose à son intégration au film, il pense que la mort de Taylor serait incohérente vis à vis de la forme satirique du film7,62. La fin doit montrer selon lui que l'homme n'a pas de salut possible7.
Le journaliste français Olivier Père met en parallèle La Planète des singes avec l'autre grand film de science-fiction sorti en 1968 : 2001, l'Odyssée de l'espace de Stanley Kubrick25. Selon lui, même si le second est plus expérimental que le premier, les deux films partagent plusieurs thèmes et ambitions : « voyages intergalactiques, collision entre les origines de l’humanité et un futur angoissant, réflexion sur l’idée de civilisation, d’évolution et de violence à une époque et dans un pays, les États-Unis, où les théories de Darwin déchainent toujours les passions »25. Le journaliste ose également une comparaison avec un autre film de 1968 : le drame Le Plongeon de Frank Perry25. Les deux films montrent en effet « un voyage dans l’espace et le temps d’un homme mûr ramené à un état primitif et enfantin, et qui se termine par une révélation cruelle et destructrice »25. Dans Le Plongeon, l'acteur Burt Lancaster passe le film en maillot de bain tandis que dans La Planète des singes Charlton Heston est le plus souvent vêtu seulement d'un pagne. Cela permet aux deux acteurs de montrer que malgré leur âge, ils ont conservé un physique athlétique. Selon Olivier Père ces films peuvent aussi se voir « comme des coming out de deux stars dont la bisexualité était un secret de polichinelle et qui trouvaient devant la caméra la possibilité d’exprimer leur narcissisme »25. C'est d'ailleurs dans La Planète des singes que Charlton Heston effectue sa première scène entièrement dénudé7.
Le film sort aux États-Unis d'abord en bobine Super 8 dans les années 1970, puis en VHS seule ou en coffret intégrale avec les autres films de la série dans les années 198070. Il sort ensuite en LaserDisc au début des années 199075 et en DVD en 200076. En 2009, sort une version Blu-ray avec de nombreux bonus comme une introduction du film par Le Législateur, des commentaires des acteurs, du maquilleur John Chambers, du compositeur Jerry Goldsmith et d'Eric Greene, auteur de Planet of the Apes as American Myth ou un documentaire sur les coulisses du tournage77.
Le film est compris dans plusieurs intégrales, notamment en octobre 2001 dans le coffret avec les quatre films de 1970 à 197378, en avril 2006 dans un coffret Tête de singe avec les films de 1970 à 2001 et la série télévisée de 197479en octobre 2010 dans le coffret avec les quatre films de 1970 à 197380, en août 2011 dans le coffret avec les quatre films de 1970 à 197381, en décembre 2011 dans un coffret de sept films avec les cinq films de 1970 à 2001 et La Planète des Singes : Les Origines82, en octobre 2013 dans un coffret baptisé Générations avec le film de 2001 et Les Origines83, en novembre 2014 dans un coffret Tête de César avec les sept autres films84 et en octobre 2016 dans le coffret L'héritage avec les quatre films de 1970 à 197385.
Afin de faire de la promotion à moindre frais, Jacobs décide d'inviter sur le tournage plusieurs journalistes de presse et leur propose même de faire de la figuration. Ainsi, James Bacon du Los Angeles Herald Examiner endosse le costume d'un soldat gorille86.
La campagne mercatique que le producteur Arthur P. Jacobs met en place pour le film est assez inédite à Hollywood. Les dirigeants de la Fox sont au départ perplexes. Cependant le bénéfice des produits dérivés est si important qu'il rapporte plus que le film lui-même74. Par exemple, pour cinq cents les enfants américains peuvent acheter une pochette de papier présentant l'image de Zaïus et Cornélius qui, regard fixe, se détachent des frondaisons. La pochette renferme deux petites cartes imprimées sur papier glacé avec une photo couleur tirée du film au recto accompagnée d'une légende d'angle à sensation. Au revers figure en quelques lignes le contexte de la scène87. Des poupées, des jeux de cartes, des masques et des figurines de singes sont également mises sur le marché dès l'hiver 196850. Quelques années plus tard, d' à , Marvel Comics adapte La Planète des singes en bande dessinée dans les numéros 1 à 6 de son magazine Planet of the Apes. L'adaptation est réalisée par le scénariste Doug Moench et par plusieurs dessinateurs88.
Le coup de théâtre final, avec son bruitage creux du ressac en guise de ponctuation, est l'un des dénouements les plus mémorables de l'histoire du cinéma7,47,51,3,74. Il n'est pas là pour envoyer un message particulier mais pour provoquer une grande surprise chez les spectateurs7. La séquence est par la suite parodiée dans le film humoristique La Folle Histoire de l'espace (1987) de Mel Brooks89 et dans le film Jay et Bob contre-attaquent (2001) de Kevin Smith90. L'ONG Greenpeace utilise également cette scène dans une campagne publicitaire contre les essais nucléaires91. La première phrase que dit Taylor après avoir retrouvé sa voix est également restée célèbre : « Take your stinking paws off me, you damn dirty ape! » en français « Je t'interdis de mettre tes pattes sur moi ». Elle figure notamment dans la liste des 100 meilleures répliques du cinéma américain établie par l'Institut américain du film en 200592.
En 1973, le magazine humoristique Mad réalise une parodie du film et de ses suites dans son numéro 157. Elle est écrite par Arnie Kogen et dessinée par Mort Drucker93. En 1996, la série d'animation Les Simpson parodie également le film dans l'épisode Un poisson nommé Selma où le personnage Troy McClure interprète Taylor dans une adaptation en comédie musicale de La Planète des singes94.
Le succès de La Planète des singes engendre également une saga de films composée de Le Secret de la planète des singes (Beneath the Planet of the Apes) en 1970, Les Évadés de la planète des singes (Escape From the Planet of the Apes) en 1971, La Conquête de la planète des singes (Conquest of the Planet of the Apes) en 1972, La Bataille de la planète des singes (Battle for the Planet of the Apes) en 1973, La Planète des singes (Planet of the Apes) en 2001, La Planète des singes : Les Origines (Rise of the Planet of the Apes) en 2011, La Planète des singes : L'Affrontement (Dawn of the Planet of the Apes) en 2014 et La Planète des singes : Suprématie (War for the Planet of the Apes) en 201725,95. Pour la télévision, la saga est également adaptée en série télévisée en 197496 et en série d'animation en 197597.
En 2018, à l'occasion des cinquante ans de la sortie du film, l'éditeur Boom! Studios sort une adaptation en bande dessinée du dernier script de Rod Serling avant son départ du projet. Cette bande dessinée est écrite par Dana Gould et dessinée par Chad Lewis98. L'artiste Paolo Rivera s'inspire de la fin du film où Charlton Heston est à genoux sur la plage pour réaliser la couverture de la bande dessinée99.
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Sur les autres projets Wikimedia :
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La Planète des singes (film, 2001)
La Planète des singes (Planet of the Apes) est un film de science-fiction américain réalisé par Tim Burton, sorti en 2001. Le scénario est de William Broyles Jr., Lawrence Konner et Mark Rosenthal. Après plusieurs années sans production cinématographique, ce film relance la franchise Planète des singes et devient la seconde adaptation du roman La Planète des singes de Pierre Boulle.
L'histoire suit le capitaine Léo Davidson, un astronaute qui s'écrase sur une planète inconnue. Capturé par des singes évolués, il découvre que ceux-ci dominent la planète et réduisent en esclavage les humains qui s'y trouvent. Léo décide alors de s'enfuir pour reprendre contact avec la station spatiale sur laquelle il était stationné mais également pour retrouver la civilisation humaine qui domine les singes sur Terre.
Envisagé dès 1988 par la société de production Fox avec différents scénaristes et réalisateurs, un candidat définitif est trouvé en 1999. Contraints par une date de sortie pour l'été 2001, la préproduction, le tournage et la postproduction sont très rapides. Le tournage se déroule de à , principalement au studio de Sony Pictures à Culver City mais aussi sur les rives du lac Powell et dans le désert des Mojaves. La musique du film est composée et dirigée par Danny Elfman.
Le film traite notamment de l'esclavage et du renversement des valeurs mais aussi de thèmes récurrents dans le cinéma de Tim Burton comme l’arrivée d’un étranger dans un monde qu’il ne connaît pas et la dynamique circulaire de la vie.
La Planète des singes est un succès commercial mais un échec critique. Il remporte quelques prix, notamment pour ses costumes et maquillages. Il sort en vidéo début 2002 et engendre plusieurs produits dérivés.
En 2029, à bord de la station spatiale américaine Obéron, l'astronaute Léo Davidson travaille avec des primates formés aux missions spatiales. Quand un dangereux orage magnétique approche de la station, c’est Périclès le singe préféré de Léo qui est choisi pour piloter un module spatial afin de sonder cette tempête1,2. Cependant une fois à l’intérieur de l'orage, la navette disparaît. Contre les ordres de son commandant, Léo part à la recherche de Périclès à bord d’un second module. Entré à son tour dans la tempête magnétique, il perd le contact avec l'Obéron puis s'écrase sur une planète appelée Ashlar. Il découvre alors que ce monde est gouverné par des singes humanoïdes dont les militaires sont menés par le général haineux Thade, et que les humains servent d'esclaves aux singes1,2.
Emprisonné chez Limbo, un marchand d'esclaves, l'astronaute fait la connaissance d’une chimpanzée nommée Ari qui milite pour l’amélioration du traitement des humains. Surprise par l’intelligence de Léo, Ari l’achète ainsi qu’une humaine nommée Daena pour qu’ils deviennent domestiques chez son père, le sénateur Sandar. Léo profite alors de sa nouvelle condition pour s'échapper en compagnie de Daena et ses proches ainsi que d'autres humains ; Ari se joint à eux accompagné de son fidèle ami Krull, un ancien général déchu1,2. Limbo surprend l’évasion mais il est rapidement maîtrisé par Léo qui en fait son otage. Thade à qui le sénateur Sandar a donné les pleins pouvoirs, charge son second, le colonel Attar de partir à la poursuite des humains. Juste avant de mourir, le père de Thade descendant de Semos, le premier singe de l’histoire d’Ashlar que les simiens vénèrent, confit à son fils qu'autrefois, les humains étaient les maîtres et les singes leurs esclaves1,2.
Paysage des alentours de Calima
Note 1.
Durant sa fuite, Léo explique à ses nouveaux amis qui il est et d'où il vient et tente de les amener via une balise jusqu'à l'Obéron. Leur route les mène directement vers Calima, un temple interdit dédié à Semos, mais qui s’avère être les restes de l’Obéron qui s’est écrasé à la surface de la planète quelque temps après la disparition de Léo dans l'espace-temps. Léo découvre que le nom Calima provient du sigle « CAution LIve AniMAls »Note 2 inscrit sur les parois du vaisseau1 et comprend qu'il a voyagé dans le temps et que l'action se passe plusieurs milliers d'année après l'écrasement du vaisseau. La base de données de l'Obéron révèle qu'après avoir aidé l'équipage à survivre, les singes, menés par Semos, se sont rebellés. Il s'ensuivit une lutte entre les humains et les singes puis une évolution différente : les singes ont bâti une civilisation moyenâgeuse alors que les humains sont retournés à la vie sauvage1,2.
L'armée de Thade finit par rattraper les fuyards tandis qu'un grand nombre d'humains s'est regroupé autour du vaisseau de Léo qu'une rumeur fait passer pour leur sauveur. Au moment où les singes chargent, Léo utilise les dernières réserves d'énergie de l'Obéron pour déclencher une explosion qui ébranle l'armée ennemie. Les singes se ressaisissent et la bataille tourne à la mêlée générale qui fait de nombreux morts, dont Krull, tué en combat singulier par le colonel Attar. Soudain, la capsule de Périclès surgit du ciel et atterrit, après avoir lui aussi voyagé dans le temps1,2. Les singes interprètent son arrivée comme le retour de Semos, s'inclinent et les hostilités cessent. Périclès quitte sa capsule pour se réfugier dans l'épave de l'Obéron. Il est suivi par Léo et Thade qui s'affrontent à nouveau jusqu'à ce que l'astronaute parvienne à enfermer le général dans le poste de pilotage. Arrive également le colonel Attar qui finit par comprendre que les deux espèces vivaient jadis en paix. Thade est alors abandonné seul, la mort dans l'âme, à bord du vaisseau1,2.
La guerre entre les humains et les singes est terminée, et Léo décide de retourner sur Terre grâce à la navette de Périclès. Il confie ce dernier à Ari puis l'embrasse ainsi que Daena. Léo revient alors dans l'orage magnétique, ce qui lui permet de retourner dans le passé et de revenir sur Terre1,2. Il atterrit à Washington, près du Mémorial de Lincoln, mais s'aperçoit qu'il s'agit d'un monument dédié au général Thade. De nombreuses silhouettes de policiers, pompiers, journalistes et civils arrivent alors et Léo découvre avec effroi qu'elles appartiennent toutes à des singes1,2.
Liste des principaux personnages :
- Le capitaine Léo Davidson est le héros du film et sa présence est une menace pour la suprématie des singes. Peu chaleureux, Léo ne souhaite pas changer leur monde, il « veut simplement le quitter le plus vite possible »3,4. Le réalisateur Tim Burton a engagé Mark Wahlberg pour le rôle de Léo car il cherchait un acteur fort physiquement mais ayant une certaine innocence pour que le public puisse s'identifier. Wahlberg indique que c'est un honneur de travailler pour Burton3.
- Thade est le général de l'armée des singes5,6. Thade méprise les humains qu'il considère comme étant de la vermine. « Il est le seul à savoir que les humains possèdent une intelligence qui peut leur permettre de dominer les singes » remarque le producteur Richard Zanuck5. Il est interprété par Tim Roth qui indique que l'enjeu du rôle est qu'il peut instantanément passer « du calme absolu à la sauvagerie la plus bestiale »5. Thade devait originellement être un gorille blanc mais le maquilleur Rick Baker en fait un chimpanzé car les « gorilles sont passifs » alors que les chimpanzés « peuvent péter les plombs n'importe quand »7,. Tim Burton valide ce choix car lui aussi trouve les chimpanzés effrayants, brutaux et imprévisibles.
- Ari est une militante du droit des humains. Elle croit que les humains ont une âme et un potentiel pour devenir intelligents9. Elle est interprétée par Helena Bonham Carter qui est le premier choix de Tim Burton pour ce rôle10. Ce dernier indique : « Je sentais qu'Helena apporterait de la force et de la sensibilité à Ari »9. Ari évoque le personnage de Zira, le chimpanzé femelle du film La Planète des singes de 196811.
- Attar est un colonel gorille et le bras droit de Thade dans l'armée des singes. Attar a un dilemme moral entre faire son devoir et faire ce qui est juste12. Il est joué par Michael Clarke Duncan qui mesure 1 mètre 95, ce qui lui apporte une imposante présence physique12.
- Limbo est un orang-outan esclavagiste sans scrupule qui « est méprisé à la fois par les humains et par les singes car il s'occupe d'humains, ce qui est un boulot dégradant et sale »13. Limbo est le personnage humoristique du film4. Il est interprété par Paul Giamatti. L'acteur déclare être un grand fan de la série de films La Planète des singes13.
- Daena, fille de Karubi, mène avec lui la révolte des humains contre les singes. Elle est un animal sauvage qui apprend à devenir plus humaine14. Daena « représente une sorte de Belle et la Bête à l'envers » remarque Tim Burton. Elle est interprétée par l'ancienne nageuse et mannequin Estella Warren14. Daena évoque la femme sauvage Nova dont le héros du film La Planète des singes de 1968 s'éprend11.
- Krull est un ancien général gorille tombé en disgrâce puis devenu domestique chez Sandar et protecteur d'Ari15. Krull est interprété par l'expert en arts martiaux Cary-Hiroyuki Tagawa. Celui-ci indique que son entraînement l'a aidé à interpréter un gorille à la fois physiquement et mentalement15. Tim Burton rencontre Tagawa alors qu'il fait des repérages à Kauai.
- Sandar est le père d'Ari et représente l'aile libérale de la cité des singes16. Il est interprété par David Warner qui a déjà endossé un costume de gorille dans une scène du film Morgan en 196616.
- Karubi est le père de Daena et le chef des hommes sauvages. Il est interprété par le chanteur et acteur Kris Kristofferson qui dit que c'est un honneur de travailler avec Tim Burton17. Kristofferson indique que le réalisateur est « un héros chez moi, parce que j'ai huit enfants. Nous avons vu tous ses films plusieurs fois »17.
- Birn est le fils de Karubi et le frère de Daena. C'est un des humains sauvages qui vivent dans les bois. Sauvé par Léo avec sa famille, il s'attache très vite à lui18. Il est interprété par Luke Eberl, un acteur de quinze ans dont c'est le troisième film18. Ce personnage d'adolescent n'est pas présent dans la première version du scénario, il est ajouté à la demande des producteurs pour favoriser l'identification des jeunes spectateurs19.
Charlton Heston et Linda Harrison interprétant respectivement Taylor et Nova dans le film de
1968.
- Le père de Thade apparaît brièvement sur son lit de mort, où il fait une révélation fracassante à son fils. Le père de Thade est joué par Charlton Heston, l'interprète de Taylor, héros du premier film La Planète de singes20,10. C'est le producteur Richard Zanuck qui persuade Heston de tourner à nouveau dans l'univers de La Planète des singes pour une seule journée. L'acteur avoue que le premier film n'a pas été seulement un succès, « mais m'a donné l'un de mes meilleurs rôles »20.
- La femme dans le chariot est interprétée par Linda Harrison qui a précédemment tenu le rôle de Nova dans La Planète de singes en 1968 et Le Secret de la planète des singes en 197021. Harrison fut un temps l'épouse de Richard Zanuck, producteur de ces deux films mais aussi du film de 2001. C'est Zanuck qui a tenu à ce qu'elle revienne pour tenir un petit rôle « dans un souci nostalgique »21.
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par la base de données IMDb.
Sources : Doublage Québec24, RS Doublage25 et Voxofilm23.
- Photos des acteurs principaux.
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En 1968, l’adaptation du roman de Pierre Boulle, La Planète des singes (1963), est un succès qui change le paysage cinématographique26. L’histoire de ces trois astronautes qui s’écrasent sur une planète où l’homme est redevenu une bête primitive, dominée intellectuellement par des singes qui parlent, passionne les enfants pour ses éléments fantastiques et les adultes pour sa métaphore sur la situation géopolitique de l’époque26. Richard Zanuck, directeur de production à la 20th Century Fox, lance immédiatement une suite Le Secret de la planète des singes qui sort en 197026. La série se poursuit ensuite avec trois films : Les Évadés de la planète des singes (1971), La Conquête de la planète des singes (1972) et La Bataille de la planète des singes (1973)26. Ils sont suivis d'une série télévisée en 1974 et d'un dessin animé en 197526.
L'idée de refaire un film est ensuite envisagée par les responsables de la société de production Fox26. Ils commandent donc en 1988 un scénario au réalisateur Adam Rifkin dont ils ont apprécié le film Never on Tuesday (1988)27. Rifkin rédige alors une histoire qui serait la suite directe du premier film mais qui ne prendrait pas en compte les thèmes de la saga27. Elle met en scène un descendant du héros du premier film qui mène une révolte contre les singes27. Le scénario est dans un premier temps validé par la Fox, mais l'arrivée de nouveaux dirigeants met fin à ce projet27.
En 1992, le réalisateur Peter Jackson et son épouse Fran Walsh proposent un scénario pour un nouveau film28. L'histoire se passe à une époque de type Renaissance et suit un personnage « à la Léonard de Vinci ». Une fois encore, le scénario ne plaît pas aux dirigeants de la Fox28.
L'année suivante, le studio engage Oliver Stone comme producteur exécutif et nouveau scénariste avec Terry Hayes29,6. L'histoire qu'ils écrivent met en scène un généticien du futur qui voyage dans le temps jusqu'à l'âge de la pierre où il se retrouve mêlé à un conflit entre les hommes préhistoriques et des singes évolués29. Satisfait par ce scénario, la Fox lance la préproduction29,30. Les producteurs engagent l'acteur Arnold Schwarzenegger en pour tenir le rôle-titre puis Phillip Noyce comme réalisateur en 31,6. Cependant le scénariste Terry Hayes rentre alors en conflit avec les producteurs de la Fox qui souhaitent changer son scénario pour en faire une comédie29. Les producteurs le licencient en février, ce qui entraîne le départ du projet de Stone et de Noyce29,31.
Les dirigeants de la Fox engagent alors le réalisateur Chris Columbus et lui commandent un nouveau scénario32,6. Celui-ci rédige avec son collaborateur Sam Hamm une histoire reprenant des éléments du premier film mais aussi du livre de Pierre Boulle, notamment les singes évolués astronautes32. Une nouvelle fois, les dirigeants de la Fox sont moyennement convaincus32. Columbus quitte le projet fin 199531. Plusieurs réalisateurs sont ensuite contactés par les studios notamment Roland Emmerich, James Cameron et Michael Bay, mais aucun projet ne va à son terme6,32,31.
Le producteur Richard Zanuck en
1990.
En 1999, le directeur de production de la Fox, Tom Rothman, engage William Broyles, l'auteur d’Apollo 13 (1995) et Haute Voltige (1999), pour rédiger un scénario26,32. Armé de cette nouvelle histoire, Rothman tente au printemps 2000 de convaincre Tim Burton de diriger le film. Ne voulant pas faire une nouvelle version, le réalisateur est d'abord réticent mais le dirigeant de la Fox lui assure que ce n'est ni une suite ni une reprise mais une nouvelle adaptation du livre qui gardera l'essence du film original26,33,34,6,. Burton, malgré tout intéressé par les thèmes développés dans le scénario, finit par accepter26,33. Quelques jours plus tard, Tom Rothman engage dans l’équipe de production Richard Zanuck, l'ancien dirigeant de la Fox qui a produit les deux premiers films de la saga26,35,33,10.
Dans son scénario, Broyle décide de ne pas situer son action sur Terre, comme dans le premier film, mais sur une planète nommée Ashlar36. Broyles, Burton, Zanuck et le producteur exécutif Ralph Winter retravaillent alors le scénario jusqu'en juillet 2000 mais ils n'arrivent pas à le finaliser36, notamment pour réduire le coût du film33. Ils engagent alors les scénaristes Lawrence Konner et Mark Rosenthal, les auteurs de Code Mercury (1998) et Mon ami Joe (1998)et les chargent de le terminer pour le mois de novembre36,. Les deux scénaristes réduisent alors l'aspect science-fiction du film en condensant notamment les trois batailles prévues en un seul combat final36. De plus, comme Rosenthal a vécu à Bornéo avec des orangs-outans et en Afrique avec des gorilles, il apporte plus de crédibilité aux comportements des singes dans le film36.
La Fox ayant décidé de sortir le film pour l'été 2001 et le tournage étant planifié de à , Tim Burton se met rapidement à la recherche de son équipe36. Pour le maquillage des singes, il engage Rick Baker avec qui il a travaillé sur le film Ed Wood en 199434. Burton hésite longtemps entre lui et Stan Winston jusqu'à ce que ce dernier se fasse engager sur Jurassic Park 3. Pour maquiller quotidiennement cinq cents singes, Baker engage alors cent soixante-dix personnes36. De son côté, le producteur Ralph Winter parcourt le monde pour trouver des lieux de tournage36. Pour s'occuper des décors, Burton choisit Rick Heinrichs36, qui vient d'être oscarisé pour son travail sur Sleepy Hollow, le précédent film du réalisateur10. Pour les costumes, c'est Colleen Atwood qui est recrutée. Elle aussi a précédemment travaillé pour Burton sur Sleepy Hollow37. Enfin, le directeur de la photographie retenu est le Français Philippe Rousselot, oscarisé pour son travail sur Et au milieu coule une rivière (1992)36,10.
Tim Burton demande la réalisation d'un storyboard à l'artiste Michael Jackson pour pouvoir s'aider visuellement mais ne le suit pas au pied de la lettre afin de donner de la liberté à ses acteurs et ses collaborateurs.
Trois extérieurs sont choisis. Le premier lieu est le champ de lave de la région de Saddle à Hawaï. Ce paysage présente des îlots de forêts entourés de régions arides et inhospitalières38. Le deuxième lieu est le lac Powell, un lac artificiel à la frontière de l'Utah et de l'Arizona38. La zone offre des formations rocheuses sans aucune végétation. Les alentours du lac ont déjà été utilisés lors du tournage du film de 1968 pour les scènes d'écrasement du navire spatial38. Cependant le chef décorateur Rick Heinrichs indique : « Independence Bay, où nous avons tourné, est un endroit complètement différent de ceux utilisés dans la première version, qui ne leur ressemblent absolument pas »38. Le troisième lieu est celui des pics de Trona dans le désert des Mojaves, à trois heures de route de Los Angeles38. Ce site géologique arbore cinq cents pics de calcaire issus de lits de lacs asséchés38. Tous ces lieux ont un aspect lunaire pour que les spectateurs aient « l'impression de ne pas être sur Terre »38.
Pour les décors de la ville des singes, Heinrichs puise son inspiration dans les premières cultures humaines : celle des Égyptiens, des Étrusques, des Mayas et des Aztèques38. Cette ville, nommée « Derkein » dans le premier scénario, est située sur le flanc d'une colline de lave38. Dominée par une place centrale, elle est constituée de statues, de lianes, de racines tordues et d'énormes arbres38. Le décor comprend également le balcon de bois de la maison d'Ari et le marché aux esclaves de Limbo38. Il faut quatre mois aux équipes d'Heinrichs pour construire cet immense décor de quinze mètres de haut, de quarante mètre de large et de quatre-vingts mètres de long38. Tim Burton veut en effet que la cité soit à la fois verticale et horizontale pour rappeler le mode de vie simiesque. Le navire de l'espace est blanc et épuré pour contraster avec la luxuriance de la cité des singes38. Pour la scène de l'écrasement de la navette, le chef décorateur reconstitue une jungle avec un marécage. Le tournage dans une vraie jungle aurait été problématique, notamment pour réaliser les différentes cascades réalisées par les singes38. En effet, les cascadeurs interprétants les singes sont attachés à des câbles, ce qui impose à la production de construire le décor autour des câbles37. Le décor final de Calima est, lui, construit sur le site des pics de Trona en acier et mousse ancrés dans du béton. Ce seul décor coûte plus d'un million de dollars38.
Le responsable du maquillage, Rick Baker, est un passionné de singes, qui a notamment créé les maquillages de singes pour le King Kong de 1976, pour La Femme qui rétrécit (1981), pour Greystoke (1984), pour Gorilles dans la brume (1988) et pour Mon ami Joe (1998)7,6. Rick Baker crée de nombreux masques, contrairement au film de 1968 où il n'y avait qu'une structure de masques pour chaque espèce de singes (chimpanzés, gorilles et orangs-outans)7. Il n'a que quatre mois pour concevoir et produire des centaines de maquillages de singes7,10. En raison de ce délai très court, Beker réalise trois types de masques. Le « numéro un » est destiné aux acteurs principaux avec quatre heures de maquillage et de pose de prothèses sculptées7,10. Le « numéro deux » concerne les personnages secondaires ; il nécessite deux heures de travail et s'enfile par la tête7,10. Le « numéro trois » est réservé aux figurants ; ce sont des « masques en caoutchouc mais dont chaque poil est fixé individuellement »7,10. En plus des prothèses faciales du « numéro un », les acteurs principaux portent des crocs taillés sur mesure7. Les masques « numéro deux », eux, ne peuvent bouger que la mâchoire mais pas le reste du visage7. Pour gagner du temps, les maquilleurs sont répartis en départements, un pour le moulage, un pour les poils et postiches, et d'autres pour les dents, les mains, les oreilles et les doigts6.
La costumière Colleen Atwood réalise plus de mille costumes, parmi lesquels ceux de l'équipage du vaisseau spatial, ceux des barbares humaines et ceux des multiples représentants de la société des singes37. Les uniformes blancs sont des hommages au film de 1968 mais le reste est entièrement nouveau37. Les armures de singes sont, elles, sculptées puis moulées en fibre de verre37.
Comme Tim Burton veut que les singes se déplacent de façon réaliste, les producteurs ouvrent une « école des singes » pendant douze semaines pour les acteurs principaux mais aussi les figurants et les cascadeurs7. Le comportement simiesque est supervisé par John Alexander, un spécialiste des singes ayant travaillé avec Baker sur Greystoke, Gorilles dans la brume et Mon ami Joe7. Alexander est également chargé de l'entraînement des vrais chimpanzés. Mark Wahlberg, qui interprète le personnage qui passe le plus de temps avec eux, s'est familiarisé avec les chimpanzés durant les répétitions. Il a d'ailleurs eu quelques difficultés car, explique-t-il, « une fois j'ai serré Helena Bonham Carter dans mes bras et ils m'ont attaqué, comme ça d'un coup. Ils sont très protecteurs. Deux d'entre eux m'ont sauté dessus et ont commencé à me cogner »7.
Le tournage débute le sur les rives du lac Powell avec notamment les scènes du raid sur le campement des singes et la fuite à cheval à travers la rivière37,10. Cette dernière scène a demandé des aménagements car l'eau était trop basse et sa température trop froide. La production apporte donc un million de litres d'eau pour remonter le niveau de la rivière et utilise un énorme système au propane pour faire augmenter la température37,.
Les acteurs interprétant des singes sont alors encadrés par le chef des cascades, Charlie Croughwell, qui a travaillé avec Burton sur Batman : Le Défi et par Terry Notary, un ancien gymnaste et membre du cirque du Soleil7,10,6,. Les deux hommes ont étudié la gestuelle des gorilles et des chimpanzés pour la restituer au mieux auprès des acteurs. Croughwell indique d'ailleurs que « nous avons des bras plus courts et des jambes plus longues. Ils n'ont absolument pas notre démarche »7. Ils ont alors appris aux cascadeurs et comédiens à se rendre plus compacts, à bondir mieux que des gens normaux et à marcher avec les jambes arquées7.
Les acteurs qui jouent des singes ne mangent pas avec ceux jouant les humains, « uniquement parce que manger est un truc déprimant quand on porte ces maquillages » précise Tim Roth7. « Il faut s'habituer au fait que votre bouche n'est plus au même endroit : si vous visez votre vraie bouche, vous vous en mettez plein le latex. Comme les lèvres sont étirées, la nourriture se coince là-dedans et ce n'est pas joli-joli. Du coup, les repas étaient le moment le plus déprimant de la journée »7.
Pour les acteurs principaux jouant les singes, telle Helena Bonham Carter, la journée de travail commence à deux heures trente du matin par la séance de maquillage et se finit tard dans la nuit. Richard Zanuck précise : « elle arrivait à s'endormir, parfois, mais je ne crois pas que son sommeil était bon. C'était vraiment dur mais elle est fabuleuse »37. D'autres acteurs comme Deep Roy, Isaac C. Singleton Jr. et Kevin Grevioux interprètent chacun plusieurs personnages secondaires. Grevioux est d'ailleurs l'acteur qui a vécu le plus de séances de maquillage.
Après une semaine de tournage, l'équipe s'installe ensuite aux studios Los Angeles Center pour les scènes de forêt et celles de la station spatiale Obéron37. Le tournage part après cela pour quatre semaines aux studios de Sony Pictures à Los Angeles en Californie où le plateau numéro trente accueille notamment la cité des singes10,37. Là, Burton utilise beaucoup de maquettes dans les décors plutôt que des fonds bleus car il préfère leur dimension humaine qui génère selon lui plus de magie malgré leurs imperfections. Suivent ensuite le tournage de la bataille finale aux pics de Trona pendant trois semaines puis un retour au studio de Sony et enfin le travail sur les champs de lave à Hawaï pendant deux jours37,.
Le tournage dans le désert des Mojaves est particulièrement difficile car de fortes pluies endommagent la route qu'a fait construire la production pour se rendre sur le lieu de tournage37. Le producteur Ralph Winter doit alors faire venir en urgence vingt-cinq mille mètres cube de gravier pour la réparer37. Le camp du tournage, « le plus grand que j'aie jamais vu de ma vie » note Winter, est constitué de cent véhicules, quarante chauffeurs et quatre toilettes et salles d'habillage mobiles37. La journée commence dès deux heures du matin avec le maquillage des principaux acteurs puis le maquillage des figurants par l'équipe de Rick Baker et l'habillage à la chaîne par l'équipe de Colleen Atwood. Ensuite vient l’entraînement avec les deux responsables de l'école des singes37. Le tournage se déroule alors jusqu'au coucher du soleil puis vient enfin le déshabillage, le nettoyage et la réparation des costumes jusqu'à neuf ou dix heures du soir37.
En parallèle du tournage principal de Tim Burton, le réalisateur de la seconde équipe Andy Armstrong s'occupe des séquences qui demandent du temps et qui exigent de longues préparations37. Armstrong chorégraphie les scènes de bataille puis les soumet à Burton pour que le coordinateur des cascades Charlie Croughwell puisse les concrétiser37. Pour simuler les sauts des singes, Croughwell utilise énormément de câbles avec des systèmes de freinage37. La production monte également une école des singes pour les figurants et les cascadeurs de la bataille finale37. Terry Notary forme aussi une douzaine de cascadeurs pour la scène où les singes chargent les humains en courant à quatre pattes37. Notary, qui est également la doublure de Tim Roth, réalise la cascade pour la scène où le général Thade s'accroche à un lustre pour retomber sur son cheval37.
Le tournage de La Planète des singes s'achève en 39. Avec une date de sortie fixée à fin juillet, la postproduction fait face à des délais très courts39. Les effets spéciaux, la bande sonore et le montage final doivent être complétés en quatorze semaines39. C'est Tom Peitzman, le producteur des effets visuels, qui est chargé de faire le lien entre les producteurs, le réalisateur et les entreprises chargées des effets spéciaux, notamment les superviseurs d'Industrial Light & Magic, le principal prestataire engagé pour le film39. Il recrute alors soixante-cinq à soixante-quinze artistes pour réaliser les trois cents plans à créer ou retoucher39. Les effets numériques ont été cruciaux pour réaliser certaines scènes dans l'espace comme les vues à l’extérieur de l'Obéron, les capsules spatiales et l'orage électromagnétique39. Des maquettes sont aussi utilisées pour certains plans généraux de la jungle ou de la cité des singes39. Pour la bataille finale, ce sont les figurants qui sont dupliqués par ordinateur grâce à un procédé appelé « carrelage »39. À partir de cent cinquante vrais singes, les animateurs créent une armée de plusieurs milliers d'animaux numériques39.
Pour gagner du temps, les effets spéciaux sont réalisés à San Francisco en parallèle du travail de montage effectué par Chris Lebenzon et Tim Burton à New York. Ce travail nécessite de nombreuses conférences par satellite pour coordonner au mieux l'avancement du film et le finaliser dans les temps39.
Le compositeur Danny Elfman en
2010.
Comme c'est souvent le cas pour les films de Tim Burton, c'est Danny Elfman qui écrit et produit la musique40. Le compositeur utilise pour cette bande originale énormément de cuivres et de percussions41. Qualifiée de « tonitruante et dynamique » par AllMusic, la partition comporte plusieurs morceaux forts, notamment The Hunt qui constitue une « descente tourbillonnante au cœur de l'histoire, pleine de rythmes de jungle, de cuivres combattants et de musique électronique palpitante »41. Ce morceau illustre les scènes de chasse au cours desquelles les singes poursuivent et rassemblent les humains42. Le style primitif et féroce sonne au rythme des tambours implacables42.
La musique du générique est, elle aussi, épique et percutante et rappelle celle du film Spartacus signée par Alex North19,43. Ce thème suggère l’émergence de la civilisation des singes42. Le morceau The Return est également dans cette veine, même si les cordes apportent un ton légèrement plus mélodramatique lors de sa conclusion42. Dans son ensemble la partition est qualifiée de « complexe » par les fans d'Elfman ; son style extrêmement brutal et sophistiqué la fait cependant passer aux oreilles de certains critiques pour une bande originale « bruyante »42. Old Flames et The Return sont des morceaux reposants et doux. Ils apportent un ton romantique très exotique grâce à l'ajout d'une flûte42. Pour illustrer le destin tragique de la station spatiale, la seconde moitié du morceau Calima est emprunte d'une tristesse typique du style Elfman42.
Le délai de travail trop court imposé par les producteurs oblige Elfman à réorganiser son programme d'enregistrement alors que sa partition n'est pas encore terminée42. Il doit rassembler les principaux repères sonores déjà écrits pour enregistrer les deux morceaux Ape Suite et développe d'autres morceaux pour obtenir la durée d'album désirée par la Fox. Le morceau Main Title Deconstruction semble d'ailleurs n'exister que pour faire du remplissage et donc devient redondant42. La bande originale sort en CD chez Sony le 42. En 2012, elle ressort en version longue sur trois CD avec quatre-vingt seize minutes de musique42. Même si la qualité sonore n'est pas améliorée, cette ressortie met plus en évidence la qualité du travail effectué par Danny Elfman42.
Burton indique qu'il regrette de ne pas avoir eu assez de temps pour mieux intégrer les éléments de la bande originale de Danny Elfman, qu'il trouve excellente.
Le fim est mal accueilli par les critiques de cinéma. Sur le site Rotten Tomatoes, il obtient le score de 45 % pour un total de cent cinquante-sept critiques44. Il dispose d'une note légèrement plus haute, à 50 % basée sur trente-quatre avis, sur le site Metacritic45. En France, il reçoit des critiques mitigées ; le site Allociné propose une note de 3,2 sur 5 à partir de l'interprétation de 18 titres de presse46. Tim Burton estime lui-même que son film n'est pas exempt de défauts19. Il indique d’ailleurs à ce sujet : « Je crois que le principal problème du film tient au fait que je ne pouvais pas tourner le scénario qu'ils voulaient. On vous donne une date butoir de sortie, et pour la respecter, il faut d'abord déconstruire le scénario pour des raisons de budget et puis, très vite, c'est tout le film qui finit par se déconstruire »19.
En Amérique du Nord, Roger Ebert du Chicago Sun-Times loue la fin du film, mais estime qu'il manque d'une histoire équilibrée. Ebert écrit que « le film est superbe. Le maquillage de Rick Baker est convaincant, même sur les gros plans, et ses singes ont une personnalité et une prestance brillante. Les décors et les lieux de tournage nous donnent une véritable impression d'oppression extraterrestre. [...] Tim Burton réalise un film respectueux de l'original et respectable en soi, mais cela ne suffit pas. Dans dix ans, ce sera la version de 1968 que les gens loueront encore »47. Peter Travers, de Rolling Stone, rédige une critique essentiellement négative. « Appelez cela une déception, aggravée par un scénario de mauvaise qualité. Pour citer Heston dans le premier film : Oh mon Dieu… C'est pas vrai… C'est pas possible48… » Kenneth Turan, du Los Angeles Times, estime que « les acteurs dans les rôles de singes sont pour la plupart trop recouverts de maquillage pour faire passer des émotions fortes ». Turan indique que « La Planète des singes démontre que même une démarche trop sérieuse peut être un handicap »49. Elvis Mitchell, de The New York Times, écrit une critique plus favorable, estimant que le scénario est bien équilibré et que le film remplit sa fonction de « pur divertissement »50. Susan Wloszczyna, de USA Today, apprécie La Planète des singes, estimant que la réussite est essentiellement due au travail de maquillage de Rick Baker51.
En France les critiques sont partagés. Côté positif, Marc Toullec de Ciné Live, écrit que ce n'est pas un chef-d'œuvre « mais une fable de science-fiction efficacement menée et visuellement flamboyante »6. Jean-Michel Frodon, du journal Le Monde, indique que c'est « un film d'auteur spectaculaire, drôle et visuellement très beau. [...] Un film magnifique, d'une extrême finesse et d'une totale lisibilité »46. Alain Grasset, du Parisien, confirme qu'il s'agit « d'un vrai univers fantastique avec des images superbes signées d'un Français, Philippe Rousselot, et des dialogues qui ne manquent pas d'humour »46. Annie Coppermann, des Echos, trouve « l'univers visuel d'une rare originalité, et d'une sombre beauté » mais questionnant la pertinence d'une nouvelle version52,46. Côté négatif, le critique du Nouvel Observateur trouve le film simplet, manquant de rythme et avec un scénario faible46. Frédéric Bonnaud, des Inrockuptibles, écrit que le film est « nettement inférieur à la première version de Schaffner »53,46. Didier Péron de Libération, trouve le scénario faible et la prestation de Mark Wahlberg « falote » et s'interroge : « on peut se demander calmement pourquoi cette nouvelle soi-disant plus proche du roman de Pierre Boulle et dirigé par un des cinéastes les plus brillants du moment, est à tel point hors sujet et une telle déconvenue. »54,46. Gérard Delorme, pour Première, indique que le film est « gentil, impersonnel et anodin »46.
De nombreuses critiques ont été émises sur la fin du film. Tim Roth, qui interprète le général Thade, déclare : « Je ne peux pas expliquer cette fin. Je l'ai vue deux fois et je ne comprends rien »33. Helena Bonham Carter, qui joue Ari, indique : « Je pensais que c'était logique, en quelque sorte. Je ne comprends pas pourquoi tout le monde crie Hein ? Léo est reparti en arrière et il réalise que Thade a finalement gagné »33. Bien que la fin soit ambiguë, elle est très proche de la fin du livre de Pierre Boulle, contrairement au film de 1968 avec Charlton Heston. Dans le livre La Planète des singes, l'astronaute accompagné de sa famille arrive à l'aéroport d'Orly pour y être accueilli par un gorille. Burton prétend que la fin n'est pas censée avoir de sens philosophique, mais qu'elle représente un rebondissement intéressant pour une éventuelle suite. Il explique : « C'est un rebondissement honnête qui peut être utilisé au cas où la Fox ou un autre cinéaste voudrait faire un autre film ». Il souhaite avoir une fin qui laisse une impression bizarre, qui ne s'explique pas et qui laisse avant tout une interrogation.
La Planète des singes est un succès commercial avec 362 211 000 dollars de recettes pour un budget de 100 000 000 de dollars. Il se hisse à la dixième place annuelle en Amérique du Nord et à la neuvième place au niveau mondial22. En France avec 3 970 000 entrées, le film se classe en dixième position du box-office de l’année 2001 loin devant les films de science-fiction A.I. Intelligence artificielle (34e) et Ghosts of Mars (85e)55.
Résultats au box-office par région/pays
Pays | Box-office (2001) | Classement de l'année (2001) |
Monde |
362 211 000 US$ |
9e |
France |
3 970 000 entrées |
10e |
États-Unis |
180 011 000 US$ |
10e |
Europe |
16 706 000 entrées56 |
|
Le film est essentiellement nommé pour le travail de costumière de Colleen Atwood et de maquillage de Rick Baker57. Ce dernier obtient d'ailleurs deux prix, l'un du Las Vegas Film Critics Society et l'autre du Phoenix Film Critics Society57. Danny Elfman obtient également un prix au BMI Film and TV Awards57.
Note : sauf mention contraire, les informations ci-dessous sont issues de la page Awards du film sur l'Internet Movie Database57. Ici sont listés les principaux prix.
Le film traite notamment de l'esclavage en empruntant son imagerie comme la carriole-prison qui est tractée par six humains qui subissent les coups de fouet d'un singe négrier10. L'acteur Tim Roth confirme que « d'une certaine manière, cela rappelle les gens amenés d'Afrique pour en faire des esclaves »36. Le personnage d'Ari, interprété par Helena Bonham Carter, est la seule à remettre en cause ce système qui semble être accepté par l'ensemble de la population simienne10,19.
Ari est d'ailleurs un personnage essentiel car sa relation passionnée avec l'humain Léo Davidson crée une tension sexuelle sous-jacente36. Tim Burton ne l'a cependant pas approfondie car il trouve « plus efficace de laisser planer le doute en évoquant subtilement ce sentiment »6. Le scénariste William Broyles indique à ce sujet que « si on accepte le fait que la conscience traverse la barrière des espèces […], alors ce qui attire chez l'autre, c'est ce qu'il est au fond de lui, bien plus que son apparence »36. Le but du scénariste est que son histoire permette de regarder l'autre « sans tenir compte des différences culturelles, raciales intellectuelles, nationales ou religieuses »36.
Le film développe également le thème du renversement des valeurs26,10,6. Celui-ci permet selon le scénariste de sonder le cœur de l'humanité et lui faire se poser des questions essentielles comme : « Qui sommes-nous ? D’où viennent nos préjugés ? […] Que pouvons-nous apprendre d'un monde où les singes sont l'espèce dominante36 ? »
Un thème, récurrent chez Tim Burton, est celui de l'homme projeté dans un univers qui lui est étranger26. Davidson est « à la recherche de lui-même »36. Il n'est pas comme Taylor, le héros du premier film, qui est un personnage amer et désenchanté. Davidson cherche sa destinée36. Il est également plus jeune et donc « plus souple psychologiquement »36. La scène où il tombe dans la jungle symbolise sa naissance dans ce nouvel univers. Il pénètre dans la jungle à l'intérieur d'un vaisseau à la former ovoïde (l'embryon), il s'extirpe de l'eau (liquide amniotique) puis enlève sa combinaison (le placenta). Davidson est également l'exclu qui se trouve mêlé à une confrontation entre maîtres et opprimés comme les villageois qui pourchassent Edward dans Edward aux mains d'argent (1990) ou le Pingouin qui décide de faire payer à la société de Gotham le crime de ses parents dans Batman : Le Défi (1992)10. Cette idée est présente depuis très longtemps chez Burton puisqu'il imaginait dans sa jeunesse être le monstre de Frankenstein et que ses voisins étaient les villageois en colère qui le poursuivaient.
Tim Burton met également en avant un thème récurrent de la mythologie de La Planète des singes, qui la structure dans son ensemble et qui en fait une « dynamique circulaire »6,. Il s'agit de l'aspect d'incertitude qui plane en permanence dans les films de la saga10. Cela permet de poser des « questions sur la théorie de l’évolution, l'impact de Darwin, les convictions religieuses et le racisme »6. Burton trouve ce thème intéressant car, selon lui, les gens se contredisent en permanence, ce qui complique l'appréhension de la notion de « réalité ». Pour lui « les gens tournent en rond, disent des choses qu'ils pensent, mais ils ne semblent pas être convaincus ». La présence de Charlton Heston est, selon Burton, elle aussi liée à la « dynamique circulaire », car cela inverse les rôles. Du héros humain du premier film, il devient un singe dans cette nouvelle version.
Pour la scène de la jungle où les singes s'emparent des humains, Tim Burton s'inspire notamment des singes volants du film Le Magicien d'Oz (1939). Burton a vu ce film pour la première fois alors qu'il était enfant et les singes volants l'avaient alors terrorisé. Pour la scène du repas des singes et la scène où des singes jouent aux cartes, le réalisateur s'inspire de la série de peintures Chiens jouant au poker de Cassius Marcellus Coolidge.
La Planète des singes sort en DVD en février 200258. Il comprend plusieurs bonus comme les coulisses du film, un documentaire en multi-angles, des scènes en versions allongées, le commentaire audio du réalisateur et du compositeur et une galerie de photos59. En 2010 sort une version Blu-ray avec les mêmes bonus60.
Le film est compris dans plusieurs intégrales, notamment en avril 2006 dans un coffret Tête de singe avec les 5 films de 1968 à 1973 et la série télévisée de 197461, en décembre 2011 dans un coffret de sept films avec les cinq films de 1968 à 1973 et La Planète des Singes : Les Origines62, en octobre 2013 dans un coffret baptisé Générations avec le film de 1968 et Les Origines63 et en novembre 2014 dans un coffret Tête de César avec les sept autres films64.
En 2001, pour accompagner la sortie du film, de nombreux produits dérivés sont mis sur le marché65. L’éditeur de bande dessinée Dark Horse réalise l'adaptation en comics du film de Tim Burton66,65. Dark Horse sort ensuite trois mini-séries dans l’univers de La Planète des singes : The Human WarNote 18, Old GodsNote 19 et Blood LinesNote 20,66. Les bandes dessinées se déroulent plusieurs dizaines d'années après les événements décrits dans le film66.
L'éditeur de romans HarperCollins sort également une mise en roman du film ainsi que deux suites : Planet of the Apes: The Fall et Planet of the Apes: Colony tous trois écrits par William T. Quick67. Il réalise également une adaptation pour enfants, écrite par John Whitman, elle aussi accompagnée par deux suites : Planet of the Apes: Force et Planet of the Apes: Resistance67. Deux autres romans pour enfants devaient compléter l'ensemble mais ils ont été annulés67. Ils avaient pour titre Planet of the Apes: Rule et Planet of the Apes: Extinction67.
La société Hasbro produit une gamme de jouets68,65. Elle crée notamment des figurines des personnages d'Ari, d'Attar, de Daena, de Krull, de Léo Davidson, de Limbo, de Périclès et de Thade68,65. Attar, Daena et Léo sont également déclinés en mannequins articulés de trente centimètres65.
Un jeu vidéo du même nom sort parallèlement au film, sur Microsoft Windows et PlayStation69, et est développé par la société française Visiware70. Les créateurs n'ont pas utilisé le scénario du film mais ont développé une histoire inspirée du roman de Pierre Boulle et des films La Planète des singes de 1968 et Le Secret de la planète des singes (1970)70. Le jeu est co-édité par Fox Interactive et Ubisoft en pour la version sur ordinateur et en sur PlayStation71. Une version développée par Torus Games pour Game Boy Advance et Game Boy Color sort en 70,71.
Bien que le film soit un succès commercial, les producteurs décident de ne pas lui donner de suites. Le réalisateur Tim Burton n'est lui non plus pas intéressé. Il déclare à ce sujet qu'il préférerait plutôt « sauter par une fenêtre »33,43. En 2001, Mark Wahlberg et Helena Bonham Carter annoncent qu'ils sont prêts à jouer dans une suite, mais seulement si Burton en est le réalisateur72,73. Paul Giamatti, également favorable, imagine une éventuelle suite où « des singes conduisent des voitures, fument des cigares, porte des lunettes ou font des réunions »74. La Planète des singes est le dernier film où Burton travaille avec sa muse et compagne Lisa Marie. En effet, c’est pendant le tournage du film qu'il rencontre sa future femme et nouvelle égérie Helena Bonham Carter75,76.
Finalement, en 2008, Tom Rothman, l'un des dirigeants de la Fox, annonce le retour de la saga sous la forme d'un « redémarrage »77. Elle prend cette fois la forme d'une trilogie avec La Planète des singes : Les Origines en 2011, La Planète des singes : L'Affrontement en 2014 et La Planète des singes : Suprématie en 201778,43.
- ↑ Les alentours du lac Powell, situé en Arizona et en Utah, sert de lieu de tournage à des scènes se déroulant près de Calima.
- ↑ Caution live animals qui signifie « Attention animaux vivants ».
- ↑ Glenn Shadix a déjà travaillé avec Tim Burton sur le film Beetlejuice (1988).
- ↑ « Musique du générique » en français.
- ↑ Revenir plus haut en :a et b « Suite des singes » en français.
- ↑ « Lancement dans le fin-fond de l'espace » en français.
- ↑ « La chasse » en français.
- ↑ « Marquage du troupeau » en français.
- ↑ « La sale besogne » en français.
- ↑ « S'échapper de la cité des singes et La légende » en français.
- ↑ « Anciennes flammes » en français.
- ↑ « Thade devient singe » en français.
- ↑ « Préparation de la bataille » en français.
- ↑ « La bataille commence » en français.
- ↑ « Le retour » en français.
- ↑ « Déconstruction de la musique du générique » en français.
- ↑ « Remix de Règne sur la planète » en français.
- ↑ « La guerre humaine » en français.
- ↑ « Anciens dieux » en français
- ↑ « Liens de sang » en français.
- ↑ Revenir plus haut en :a b c d e f g h i et j Salisbury 2001, p. 120-174.
- ↑ Revenir plus haut en :a b c d e f g h et i Liardet 2021, p. 212-213.
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